Le Centre Spirite Lyonnais Allan Kardec


VIII. LES LOIS DE LA COMMUNICATION SPIRITE.


Nous savons que tout vibre et rayonne dans l’univers, car tout est vie, force, lumière. La nature, dans ses moindres atomes, est pénétrée d’une énergie infinie, source de tous les phénomènes. De même, chaque Esprit, libre ou incarné, a, selon son état d’avancement et de pureté, un rayonnement de plus en plus intense, rapide, lumineux.

La loi des attractions et des correspondances régit toutes choses ; les vibrations, en attirant des vibrations similaires, rapprochent et unissent les cœurs, les pensées, les âmes.

Nos convoitises, nos désirs mauvais, créent autour de nous une atmosphère fluidique malsaine, favorable à l’action des influences de même ordre, tandis que les hautes aspirations attirent les vibrations puissantes, les radiations des sphères supérieures.

Tel est le principe de l’évolution ; il réside dans le pouvoir de l’être de s’assimiler les forces mystérieuses de la nature, pour s’élever avec leur aide et remonter de degré en degré vers la cause des causes, vers la source intarissable d’où découle toute vie.

L’échelle ascensionnelle comporte des plans successifs et superposés ; sur chacun d’eux les êtres sont doués du même état vibratoire, de moyens de perception analogues qui leur permettent de se reconnaître les uns les autres, tandis que restent invisibles, et souvent même inconnaissables pour eux, les êtres des plans supérieurs, par suite de leur état vibratoire plus rapide et de leurs conditions de vie plus subtiles et plus parfaites.

C’est ce qui se produit pour les Esprits, entre eux, selon leurs différents degrés d’épuration, et pour nous-mêmes par rapport à eux. Mais de même qu’on peut agrandir le champ de la vision humaine, à l’aide des instruments d’optique, de même on peut accroître ou réduire la somme des vibrations, de façon à atteindre un état intermédiaire où les modes d’existence de deux plans distincts se combinent et entrent en rapport.

Pour communiquer avec nous, l’Esprit devra amoindrir l’intensité de ses vibrations, en même temps qu’il activera les nôtres. L’homme y peut aider par sa volonté ; le point à atteindre pour lui constitue l’état de médiumnité.

Nous savons que la médiumnité, dans la plupart de ses applications, est la propriété que possèdent certains d’entre nous de s’extérioriser à des degrés divers, de se dégager de leur enveloppe charnelle et de donner plus d’amplitude à leurs vibrations psychiques. De son côté, l’esprit que la mort a libéré s’enveloppe de matière subtile et amortit ses propres radiations pour se mettre à l’unisson du médium.

Ici, des chiffres explicatifs sont nécessaires. Admettons, à l’exemple de quelques savants, que les vibrations normales du cerveau humain soient au nombre de 1.000 par seconde. A l’état de trance ou de dégagement, l’enveloppe fluidique du médium vibre avec plus de puissance, et ses radiations atteignent le chiffre de 1.500 à la seconde. Si l’Esprit, libre dans l’espace, vibre dans le même temps sous l’influence de 2.000 vibrations, il lui sera possible, par une matérialisation partielle, d’abaisser ce nombre à 1.500. Dès lors, les deux organismes vibrent sympathiquement ; des rapports peuvent s’établir, le message de l’Esprit sera perçu et transmis par le médium entrancé.

C’est cette harmonisation des ondes vibratoires qui donne parfois au phénomène des incorporations tant de précision et de netteté. Dans les autres états de médiumnité, la pensée de l’Esprit pourra également se communiquer par des vibrations correspondantes, quoique moins intenses que les vibrations initiales, de même qu’une note se répète d’octaves en octaves, depuis la clef la plus haute de la vibration harmonique jusqu’à la plus basse.

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Chez l’homme, l’intelligence et le développement du cerveau sont en corrélation intime ; l’une ne peut se manifester sans l’autre. A mesure que l’être monte sur l’échelle humaine, du plus sauvage au plus civilisé, le front grandit, le crâne s’élargit, en même temps que l’intelligence s’épanouit. Quand le développement extérieur atteint son apogée, la pensée augmente la puissance interne du cerveau en multipliant les lignes, en creusant des sillons. Elle dessine des stries, des circonvolutions innombrables ; elle élève des sommets. Elle fait du cerveau un monde merveilleux et compliqué, à tel point que l’examen de cet organe, encore vibrant des impressions de la vie qui vient de s’enfuir, est un des spectacles les plus captivants pour le physiologiste.

Nous avons là une preuve que la pensée travaille et façonne le cerveau, qu’il y a entre eux une relation étroite ; il est l’instrument admirable, le clavier dont elle joue, dont elle tire toutes les harmonies de l’intelligence et du sentiment. Mais comment s’exerce son action sur la matière cérébrale ? Par le mouvement. La pensée imprime aux molécules du cerveau des mouvements vibratoires d’une intensité variée.

Nous l’avons vu [1], tout, dans la nature, se résume en vibrations, perceptibles pour nous tant qu’elles sont en harmonie avec notre propre organisme, mais qui nous échappent dès qu’elles sont trop rapides ou trop lentes. Notre puissance de vision et d’audition est très limitée ; mais au delà des bornes qu’elle nous trace, les forces de la nature continuent à vibrer avec une rapidité vertigineuse sans que nous percevions rien.

Eh bien ! de même que les sons et la lumière, les sentiments et les pensées s’expriment en vibrations, qui se propagent dans l’étendue avec des intensités diverses. Les pensées de haine et de colère, les tendres appels de l’amour, la plainte du malheureux, les cris de passion, les élans d’enthousiasme, s’en vont à travers l’espace, disant à tous l’histoire de chacun et l’histoire de l’humanité. Les vibrations des cerveaux pensants, d’hommes ou d’Esprits, se croisent et s’entrecroisent à l’infini sans jamais se confondre. Autour de nous, partout, dans l’atmosphère, roulent et passent, comme des fleuves sans fin, des courants d’idées, des flots de pensées qui impressionnent les sensitifs et sont souvent une cause de trouble et d’erreur dans les manifestations.

Nous disons : hommes ou Esprits. En effet, ce que le cerveau humain émet sous forme de vibrations, le cerveau fluidique de l’Esprit le rayonne sous forme d’ondes plus étendues, de radiations qui vibrent sous un rythme plus large et plus puissant, car les molécules fluidiques, plus souples, plus malléables que les atomes du cerveau physique, obéissent mieux à l’action de la volonté.

Cependant ces cerveaux, spirituels et humains, contiennent les mêmes puissances. Mais, tandis qu’en notre cerveau mortel ces puissances sommeillent ou vibrent faiblement, chez les Esprits elles atteignent leur maximum d’énergie. Une comparaison nous fera mieux saisir ce phénomène.

Cette comparaison, Ch. Drawbarn[2] la trouve dans un bloc de glace, où sont contenues à l’état latent toutes les potentialités qui retiennent unis les cristaux dont il se compose. En soumettant ce bloc à l’action de la chaleur, vous en dégagerez des forces qui iront croissant jusqu’à ce que, passé à l’état de vapeur, il ait recouvré et manifesté toutes les énergies contenues en lui. Notre cerveau serait comparable à ce bloc de glace, vibrant faiblement sous l’action restreinte de la chaleur, alors que celui de l’Esprit sera la vapeur devenue invisible parce qu’elle vibre et rayonne avec trop de rapidité pour tomber sous nos sens.

La différence des états se complique de la variété des impressions. Sous l’influence des sentiments qui les animent, depuis le calme de l’étude jusqu’aux orages de la passion, les âmes et les cerveaux vibrent à des degrés divers, suivant des vitesses différentes, l’harmonie ne peut s’établir entre eux que lorsque leurs ondes vibratoires s’égalisent, comme c’est le cas pour des diapasons identiques ou des plaques de téléphone. Un cerveau aux faibles et lentes impulsions ne peut s’harmoniser avec tel autre dont les atomes sont animés d’un mouvement qui tient du vertige.

Dans les communications spirites, la difficulté consiste donc à accorder des vibrations et des pensées différentes. C’est dans la combinaison des forces psychiques et des pensées entre le médium et les expérimentateurs, d’une part, entre ceux-ci et les Esprits, de l’autre, qu’est toute la loi des manifestations.

Les conditions sont favorables lorsque le médium et les assistants constituent un groupe harmonique, c’est-à-dire lorsqu’ils pensent et vibrent à l’unisson. Au contraire, lorsque les pensées émises, lorsque les forces rayonnées divergent, elles s’entravent, s’annulent réciproquement. Le médium, au milieu de ces courants contraires, éprouve une gêne, un malaise indéfinissable ; parfois même, il est comme paralysé, annihilé. Il faudra une puissante intervention occulte pour produire le moindre phénomène.

Quand l’harmonie est complète entre les forces émanées des assistants, quand les pensées convergent vers un même objet, une autre difficulté se présente. Cette union de forces et de volontés peut suffire à provoquer des effets physiques et même des phénomènes intellectuels, que l’on est trop porté à attribuer à l’intervention de personnalités invisibles. C’est pourquoi il est prudent et sage de n’admettre cette intervention que lorsqu’elle est établie par des faits précis.

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Beaucoup de personnes s’étonnent et hésitent aux premières difficultés qu’elles rencontrent dans leurs tentatives de communiquer avec les Esprits. Elles se demandent pourquoi leur intervention est chose si rare, si peu concluante, pourquoi l’humanité entière n’est pas familiarisée avec un fait de cette importance.

D’autres personnes, en poursuivant leurs recherches, obtiennent des preuves satisfaisantes et deviennent des adeptes convaincus. Cependant, elles objectent encore que leurs bien-aimés de l’espace, parents et amis défunts, malgré des désirs ardents et des appels réitérés, ne leur ont jamais donné le moindre témoignage de leur présence, et cet insuccès leur laisse un reste de doute, d’incertitude pénible. C’est le sentiment que M. Flammarion lui-même exprimait dans une publication récente.

Or, tout expérimentateur éclairé s’expliquera aisément la cause de ces mécomptes. Votre désir de communiquer avec un Esprit et un semblable désir de celui-ci ne suffisent pas. Il faut encore que d’autres conditions, déterminées par la loi des vibrations, soient réunies.

Votre invisible ami entend vos appels et cherche à vous répondre. Il sait que, pour communiquer avec vous, il faut que votre cerveau physique et son cerveau fluidique vibrent à l’unisson. Il y a là une première difficulté. Sa pensée, évolue avec trop de rapidité pour que vous puissiez la percevoir. Son premier soin sera donc d’en ramener les vibrations à un mouvement plus lent. Pour cela, une étude plus ou moins prolongée sera nécessaire, et les chances de réussite  varieront suivant les aptitudes et l’expérience de l’opérateur. S’il échoue, toute communication directe deviendra impossible, et il devra confier à un esprit plus puissant ou plus habile la transmission de ses messages. C’est ce qui arrive fréquemment dans les  manifestations. Vous croyez avoir la pensée directe de votre ami, alors qu’elle ne vous parvient qu’à l’aide d’un intermédiaire spirituel. De là, certaines inexactitudes ou obscurités imputables au transmetteur et qui vous rendent perplexes, tandis que la  communication, dans son ensemble, présente tous les caractères de l’authenticité.

Dans l’hypothèse où votre ami de l’autre monde possède les pouvoirs nécessaires, il lui faudra rechercher un médium dont le cerveau, par ses mouvements vibratoires, soit susceptible de s’harmoniser avec le sien. Mais la variété est aussi grande entre les cerveaux qu’entre les voix ou les visages ; l’identité absolue n’existe pas. L’Esprit en sera réduit à se contenter de l’instrument le moins impropre au résultat qu’il poursuit. Cet instrument trouvé, il s’attachera à en développer les qualités réceptives. Il pourra, réussir en peu de temps, mais, parfois, des mois, des années seront nécessaires pour amener le médium au degré de sensitivité voulu.

Ou bien, vous pouvez être vous-même ce médium, ce sensitif. Si vous avez conscience de vos facultés, si vous vous prêtez à l’action de l’Esprit, vous arriverez certainement au but qu’il veut atteindre. Pour cela, il faudra à la fois patience, persévérance, continuité et régularité d’efforts. Ces qualités, les aurez-vous ? Votre puissance de volonté sera-t-elle toujours égale, toujours tendue ? Si vous agissez avec incohérence, aujourd’hui avec ardeur, demain faiblement, de telle façon que les vibrations de votre cerveau varient dans des proportions considérables, vous n’aurez pas à vous étonner de la différence et même de la nullité des résultats.

Il peut arriver que, se sentant impuissant à activer suffisamment, pendant l’état de veille, les vibrations de votre cerveau, votre ami invisible ait recours à la trance et cherche, par le sommeil, à vous rendre inconscient. Alors votre périsprit s’extériorise ; ses radiations s’accroissent, s’étendent ; la transmission devient possible ; vous exprimez la pensée de l’Esprit. Mais, au réveil, vous n’en aurez nul souvenir, et ce sera par les autres que vous apprendrez ce que votre bouche aura proféré.

Tous ces phénomènes sont réglés par des lois rigoureuses ; quels que soient vos facultés, vos désirs, si vous ne pouvez y satisfaire vos parents, vos amis défunts, toutes les légions invisibles agiraient en vain sur vous. Mais voici des inconnus, hommes ou femmes, que le hasard semble mettre sur votre chemin. Ils ne savent rien de ces choses. Pour eux, la science de l’Au-delà peut être lettre close ; cependant ils possèdent un organisme qui vibre harmoniquement avec la pensée de vos proches, de votre frère, de votre mère, et, par eux, ceux-ci peuvent avoir avec vous des entretiens pleins d’abandon.

A titre d’exemple, je puis citer le fait suivant : Mon père, décédé depuis une vingtaine d’années, n’avait jamais pu se communiquer au sein du groupe dont j’ai longtemps dirigé les travaux, par aucun des médiums qui s’y sont succédés. A peine l’un d’entre eux avait-il pu l’entrevoir comme une ombre vague, indistincte. J’avais perdu tout espoir de m’entretenir avec lui, lorsqu’un soir, à Marseille, au cours d’une visite d’adieux faite à une famille amie, une dame, que l’on n’avait pas vue depuis plus d’une année, se présente et se joint à nous. Au milieu de notre entretien, elle s’endort d’un sommeil spontané, et par elle, à ma grande surprise, l’esprit de mon père, qu’elle n’avait jamais connu, se manifeste, me donne les preuves d’identité les plus irrécusables et, dans une effusion pleine de tendresse, m’exprime les sensations, les vives émotions qu’il avait ressenties depuis l’heure de la séparation.

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De l’ensemble des études sur les vibrations harmoniques des cerveaux, une constatation se dégage. C’est que, par l’orientation et la persistance de nos pensées, nous pouvons modifier les influences qui nous entourent et nous mettre en rapport avec des forces et des intelligences similaires. Ce fait n’est pas seulement exact pour les sensitifs et les médiums ; il l’est pour tout être pensant. Les influences de l’Au-delà peuvent rayonner sur nous sans qu’il y ait communication consciente avec les êtres qui le peuplent. Il n’est pas nécessaire de croire à l’existence du monde des Esprits, de vouloir le connaître, pour en ressentir les effets. La loi des attractions est inéluctable ; tout, dans l’homme, y est soumis. Aussi la critique que l’on adresse aux spirites, d’attirer exclusivement à eux, par leurs pratiques, les forces mauvaises de l’univers, tombe devant les faits.

Il dépend de l’homme de recevoir les inspirations les plus diverses, depuis les plus sublimes jusqu’aux plus grossières. Notre état mental est comme une brèche, par laquelle amis ou ennemis peuvent pénétrer en nous. Les sensuels attirent à eux des Esprits sensuels, qui s’associent à leurs désirs, à leurs actes et en accroissent l’intensité ; les criminels appellent des Esprits de meurtre, qui les poussent plus avant dans la voie du mal. L’inventeur est aidé par des chercheurs de l’Au-delà. L’orateur perçoit des images qu’il fixera en des formes de langage propres à émouvoir les foules. Le penseur, le musicien, le poète recevront les vibrations des sphères où le beau et le vrai sont l’objet d’un culte ; des âmes puissantes leur apporteront les trésors de l’inspiration, le souffle qui passe sur les fronts rêveurs et donne le talent, le génie.

Ainsi, d’un plan à l’autre, l’Esprit répond aux appels de l’esprit. Tous les plans spirituels se relient les uns aux autres. Les instincts de haine, de cruauté, de débauche attirent les Esprits de l’abîme. La frivolité attire les Esprits légers ; mais la prière de l’homme de bien, son appel aux Esprits célestes s’élève et se répercute de note en note, sur une gamme ascendante, jusqu’aux sphères les plus hautes, en même temps que, des régions profondes de l’infini, descendent sur lui les ondes vibratoires, les effluves de la pensée éternelle, qui le pénètrent d’un courant de force et de vie. L’univers tout entier vibre sous la pensée de Dieu.


[1] Voir chap. IV, la Médiumnité

[2] Professeur CH. DRAWBARN, The Science of the Communication.

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