|
Chapitre VI
Les facteurs
classiques sont impuissants à résoudre la difficulté
générale d’ordre philosophique relative à l’évolution
qui, du simple fait sortir le complexe et du moins fait sortir le plus
Cette difficulté avait été totalement
négligée ou esquivée par le transformisme classique. Elle
est cependant tout à fait redoutable.
« L'apparition spontanée » de formes supérieures aux
formes originelles est une pure impossibilité, impossibilité scientifique
et impossibilité philosophique.
On ne peut échapper au dilemme suivant : ou l'évolution n'existe
pas — ou elle implique une « immanence potentielle » dans
l'univers évoluant.
L'évolution étant démontrée, nous devons forcément
admettre que toutes les transformations progressives complexes réalisées
se trouvaient en puissance dans la forme ou dans les formes élémentaires
primitives.
Cela ne veut nullement dire que l'évolution, telle qu'elle a été
réalisée, était en germe dans telle forme primitive, comme
l'être vivant est d'abord en germe dans l'oeuf qui doit lui donner naissance.
Cette finalité préétablie semble infiniment peu probable.
Cela veut dire simplement que la forme primitive avait en elle toutes les potentialités,
celles qui ont été réalisées et, celles qui ne l'ont
pas été, dans le passé, le présent et le futur.
Quel est, dans cette conception philosophique, le rôle assigné
aux facteurs classiques de l'évolution ?
Simplement celui de facteurs secondaires et accessoires.
Ils ont joué un rôle évident ; ils ont imposé à
l'évolution un rythme particulier, et l’ont favorisée ;
mais ils ne l'ont pas produite.
On pourrait à la rigueur supposer l'évolution se faisant sans
l'intervention de la sélection ou de l'adaptation ; on ne conçoit
plus l'évolution se faisant par leur seul jeu.
Telle est la constatation capitale qui s'impose irrésistiblement.
Ainsi donc, le naturalisme classique, après un très long chemin,
vainement battu dans tous les sens, se trouve ramené, bon gré
mal gré, à la recherche de la cause première qu'il prétendait
esquiver. Son impuissance avérée à trouver les facteurs
essentiels de l'évolution ne lui permet plus de faux-fuyants.
Fiske disait que le transformisme avait remis dans le monde autant de «
téléologie » qu'il en avait enlevé. Cette formule
n'est pas heureuse, parce qu'elle implique une sorte de finalité qui
fixerait arbitrairement, d'avance, le sens de l'évolution.
Mais ce qui est indubitable, ce qui résulte clairement de l'examen approfondi
du transformisme, c'est la conclusion suivante :
L'évolutionnisme ne peut pas se passer de la philosophie.
Téléchargement | Bulletin nous écrire | LAgora Spirite |