Le Centre Spirite Lyonnais Allan Kardec


CHAPITRE II
DESCRIPTION DE LA SÉANCE DONNÉE PAR Mme D'ESPÉRANCE, LE 11 DÉCEMBRE 1893, A HELSINGFORS EN FINLANDE OU LE PHÉNOMÈNE DE LA DÉMATÉRIALISATION PARTIELLE DU CORPS DU MÉDIUM FUT CONSTATÉ PAR LA VUE ET LE TOUCHER


3. Témoignage de M. le professeur Seiling [1] (L’original est en allemand)

A. - Lettre de M. Seiling à M. Aksalkow

Monsieur,

Si, bien qu'inconnu de vous, je me permets de vous envoyer l'explication suivante, c'est que Mme d'Espérance, votre amie, en a exprimé le désir, estimant que son contenu pourrait être d'un grand intérêt pour vous.
Dans la séance spirite qui eut lieu, le 11 décembre courant, dans ma maison avec Mme d'Espérance, il se passa entre autres le phénomène suivant :
Vers la fin de la séance qui avait duré environ deux heures et demie, Mme d'Espérance à la gauche de laquelle j'étais assis, donc tout près du cabinet, me pria de tâter le siège de sa chaise mais en me laissant guider la main. Elle conduisit alors ma main par dessus tout le siège, et, à mon grand étonnement, sans que j'aie rien perçu de la partie inférieure de son corps, tandis que je pouvais voir et sentir la robe, étendue sur la chaise. Retourné à ma place, je vis Mme d'Espérance, durant un bon quart d'heure, en apparence comme si elle était assise sur la chaise, avec, toutefois, la partie inférieure de son corps manquante, de manière que la robe pendait à angle droit sur le bord du devant de la chaise.
Afin de permettre à un autre assistant d'examiner mieux ce phénomène, j'échangeai ma place avec celle de cette personne qui était située plus vers le milieu du cercle ; aussi je ne pus observer le retour du corps avec autant de netteté, que les personnes assises, de côté, parmi lesquelles se trouvait ma femme qui assure avoir vu distinctement la partie du corps revenir graduellement à son état normal.
Il me paraît même digne d'être mentionné que Mme d'Espérance a, dans cet état, bu deux fois de l'eau. L'éclairage était suffisant pour que la médium pût être à peu près aperçue des quinze places du demi-cercle.
Comme je demandais plus tard à Mme d'Espérance la raison pour laquelle j'avais dû laisser conduire ma main par la sienne, elle m'expliqua que la seule idée d'un mouvement de la chaise lui donnait des sueurs d'angoisse et que, dans ce cas, elle aurait certainement éprouvé une très grande souffrance.
Mon rapport sur toutes les séances en général qui ont eu lieu à Helsingfors sera publié fort probablement dans « Die Ubersinnliche Welt [2] ».
Veuiller agréer etc...

Max SEILING
Helsingfors, le 4/16 1893

B. - Lettre de M. Aksakow à M. Seiling

Saint-Pétersbourg, le 10/22 décembre 1893

Cher Monsieur,

Je vous suis très reconnaissant de votre lettre. Le fait est que les impressions subjectives de Mme d'Espérance peuvent bien ne pas coïncider avec la réalité existante pour nous. Voilà pourquoi j'ai attendu avec impatience la confirmation par d'autres témoins du phénomène remarquable de la disparition d'une partie de son corps à une séance, phénomène ayant la plus grande signification pour la compréhension du phénomène de matérialisation ; il est donc de la plus grande importance de l'établir avec toute la plénitude possible des détails. Dans la conviction que vous partagez complètement ce point de vue, je me permets de m'adresser à vous avec la prière de vouloir bien me donner des réponses aux questions suivantes :
1) Sur quelle chaise était assise Mme d'Espérance ? Ne pourriez-vous m'en donner le dessin ?
2) Ne pourriez-vous pas aussi me donner un croquis en profil de la figure de la médium à ce moment là, ainsi que de la position de sa robe sur la chaise ?
3) Quand Mme d’Espérance vous a appelé pour vous demander votre main, vous a-t-elle auparavant parlé de la disparition de ses genoux, ou bien vous a-t-elle, fait directement palper la chaise sans rien dire ? (ceci en cas de l'explication possible par une hallucination suggérée)
4) Quand vous passiez la main sur la chaise, avez-vous vu distinctement la partie supérieure de son corps sur la chaise, ses mains, sa tête, et avez-vous parlé avec elle ?
5) Vous écrivez : « Elle conduisit ma main sur tout le siège ». C'est un détail fort important, car on pourrait dire que Mme d'Espérance avait placé ses jambes si habilement que sa jupe pouvait tomber à plat sur une partie de la chaise, et pendre verticalement. C'est pourquoi toute la question se résume par ceci : avez-vous tâté toute la chaise, jusqu'à son dossier, et avez-vous pénétré avec votre main jusqu'en dessous de la partie supérieure du corps de Mme d'Espérance ?
6) Quel est le Monsieur auquel vous avez cédé votre place pour qu'il observe à son tour ? N'aura-t-il pas la bonté de me donner son témoignage là-dessus ?
7) Je prie bien aussi Mme Seiling de me communiquer ses observations aussi exactement que possible sur la disparition et la réapparition du corps de la médium.
8) Quelles sont les personnes qui ont donné deux fois de l'eau à la médium, et peuvent-elles témoigner de l'absence de son corps ? Car vous dites : « en cet état elle a bu deux fois de l'eau. »
9) Et enfin, en vue de l'objection que Mme d’Espérance se soit glissée adroitement derrière une chaise, en la recouvrant avec les plis de sa robe, je dois vous demander :
a) La lumière était-elle suffisante pendant toute la séance pour voir la médium à sa place, ou bien y a-t-il eu des moments où, la lumière étant plus atténuée, Mme d'Espérance a pu se lever de sa place et entrer dans le cabinet sans être remarquée ?
b) Y avait-il un espace libre entre la chaise et le rideau du cabinet ?
c) Quelqu'un a-t-il touché la partie supérieure du corps de la médium, avec la chaise, tandis que ses jambes et ses pieds étaient absents ?
Je vous prie de m'excuser de cet interrogatoire importun ; mais j'ai dû me le permettre dans l'intérêt de la cause qui m'est chère et de l'honneur personnel de Mme d'Espérance.
Veuillez agréer, etc,...

A. AKSAKOW

C. - Réponse de M. Seiling à M. Aksakow (L’original est en allemand)

Helsingfors, 7 janvier 1894

M. le conseiller d'État,

Très persuadé de l'importance des raisons qui motivent l'interrogatoire circonstancié auquel vous me soumettez, je veux répondre de mon mieux aux questions de votre lettre du 10/22 décembre 1893.
§ 1. et 2. - J'ai essayé d'y répondre par les esquisses ci-jointes. J'ai attaché une importance capitale aux questions de mesure. Comme on le voit, la partie inférieure du dossier de la chaise est interrompue. La partie supérieure du corps de Mme d'Espérance n'avait pas toujours la position droite, telle qu'elle est dessinée, mais elle était, de temps à autre, penchée en avant, notamment pendant l'examen du dossier de la chaise, par les assistants. Ici, déjà je tiens à observer qu'il était impossible que la partie supérieure du corps, telle qu'elle est dessinée et a été observée par moi avec exactitude (aussi bien de côté que plus tard par devant), ait pu avoir la position normale d'une personne assise, si la partie inférieure du corps avait été debout, derrière ou à côté de la chaise.
§ 3. - Je ne soupçonnais rien lorsque Mme d'Espérance m'appela auprès d'elle et dit : - « M. Seiling donnez-moi votre main et tâtez la chaise ». - Ce n'est qu'après avoir fait cela que je compris de quoi il s'agissait.
§ 4. - Je dis involontairement : - « Mme d'Espérance n'est pas assise sur la chaise, mais sa robe seulement est posée dessus », - justement parce que je ne sentais rien de son corps sur la chaise. Il n’est pas besoin, je crois, d'affirmer que, cependant, je pouvais voir, distinctement, toute la partie supérieure de son corps au-dessus du siège ; ce que chacun a pu également voir très suffisamment, du moins les personnes les plus voisines. J'ai aussi parlé avec Mme d'Espérance.


§ 4. - La figure 3 montre jusqu'à quel point j'étais en droit de dire que ma main a tâté le siège tout entier ; la ligne en zig-zag correspond au chemin qu'a fait ma main qui se serait trouvée, par suite de cette opération, manifestement sous le corps de Mme d'Espérance. Le fait d'avoir retiré ses jambes en haut doit être absolument écarté.
Une chose m'a frappé après coup, lorsque j'ai eu le temps de peser toutes les circonstances ; c'est qu'en tâtant le siège, il me sembla sentir la robe seulement, qui était d'une fine étoffe de laine, sans aucun vêtement de dessous ; au reste, j'ai pu me tromper, ou bien les vêtements de dessous étaient dématérialisés en même temps que son corps.
§ 6. - La personne était le docteur Hertzberg. J'ai déjà tâché de le voir pour lui soumettre votre demande, mais sans le trouver jusqu'à présent ; de toute manière, il la connaîtra.
§ 7. - Une explication de ma femme est ci-jointe.
§ 8. - L'eau fut remise à Mme d'Espérance, une fois par moi, une autre fois par le docteur Hertzberg. Lorsque je m’approchai de Mme d'Espérance avec le verre d'eau, j'eus, pour la seconde fois, le même spectacle que quand j'examinai la chaise pour la première fois.
§ 9. - Le général Sederholm s'est imaginé cette explication ; je dis imaginé parce que dans cette séance il était placé trop loin, et qu'il a, de plus, trop mauvaise vue pour avoir pu faire une observation exacte. Mlle Hjelt a suffisamment expliqué dans son rapport pourquoi il a crû voir Mme d'Espérance se soulever un peu.
a) La lumière, une fois réglée, a été toujours la même. Que, malgré tout, Mme d'Espérance ait pu faire un mouvement, c'est toujours une possibilité, parce que personne n'était préparé à l'arrivée du phénomène. Par contre, si elle avait été debout derrière la chaise, il lui eût été impossible de revenir y prendre sa place sans être remarquée.
b) La chaise était si serrée contre les rideaux du cabinet qu’il n’y avait là aucun espace libre ; cependant, je pouvais distinctement voir qu'il n'y avait aucune connexion entre la chaise et le cabinet. Les principales raisons contre cette objection sont la position naturelle de la partie supérieure du corps quand il est assis, et l'impossibilité de revenir à sa place, démontrée en a.
c) Le capitaine Toppelius a, autant que je puis le savoir, palpé la partie supérieure du corps. Le docteur Herzberg et moi, nous ne l’avons point fait.
Avec l’assurance de ma considération distinguée, etc.,etc.

MAX SEILING

D. - Rapport complémentaire de M. Seiling (L’original est en allemand)

Helsingfors, 15 janvier 1894

Monsieur le Conseiller d'État,

J'espère avoir répondu quelque peu à vos désirs [3] par le rapport complémentaire de la séance du 11-12 décembre 1893 qui suit. Vous y trouverez le dessin désiré, la description de la chambre, de l'éclairage et du cabinet, de même que l'indication des assistants et leurs places.

EXPLICATION DU DESSIN

L'appartement, dans lequel eut lieu la séance du 11 décembre, se trouve situé au deuxième étage. L'entrée de la salle à manger, transformée en salle de séance, se fait par le salon. Les deux battants de la porte du salon étaient ouverts pendant la séance, mais la porte de la cuisine était fermée à clef. Il ne pouvait venir du salon qu'une faible lumière, car il n'était pas éclairé, et les deux fenêtres étaient à peu près closes par d'épais rideaux. Devant les fenêtres de la salle à manger se trouvent des petits rideaux de vitrage en tulle blanc, ainsi que des stores blancs remontés. Ceux-ci n'étaient baissés que devant la fenêtre de droite la plus rapprochée du salon. La lumière principale venait de la rue, par la fenêtre de gauche. Il y avait de plus une petite lampe à huile allumée, et placée dans la niche du poêle ; les portes de la niche étaient disposées comme sur le dessin ; la fente de devant était couverte de papier rouge et celle au dessus avec le châle de Mme d'Espérance. Je pouvais distinctement voir la forme de la tête et les mains de la médium ; par contre, très peu la coiffure parce que, de ma place, l'arrière-fond était obscur.
Il arrive tant de lumière de la rue que, lorsque les deux stores sont relevés, et qu’il ne brûle aucune lumière dans la chambre, on peut très bien se reconnaître à deux mètres de distance.


Le cabinet n'était pas posé contre le mur parce que la glace qui s'y trouve est pourvue d'une console. Il n'était pas non plus posé au milieu entre les deux fenêtres, mais en face des trois personnes occupant le milieu du cercle, et dont la position a déjà été donné. La largeur, la profondeur et la hauteur du cabinet étaient de 120, de 60 et de 180 cent. ; il était vide.
Sur la petite table, à côté de moi, se trouvait une carafe d'eau, une bougie (non allumée), du papier et des crayons.
Le capitaine Toppelius occupait, pendant la première demi-heure, la place de son père. Celui-ci peut donc aussi renseigner sur les mains qui étaient tendues du cabinet.
Les dimensions totales de la chambre et des meubles sont dessinées dans leur proportion exacte, et à l'échelle indiquée.

RAPPORT

La séance commença à sept heures trois quarts et finit environ à huit heures un quart.
Une lampe allumée était sur la table, près dit poêle ; elle fut éteinte après que toutes les personnes, y compris la médium, eurent pris leurs places. La médium portait une robe façon princesse, en laine très claire et garnie de dentelles dans le haut. Pendant le premier quart d’heure environ, l'éclairage fut réglé, le store de la fenêtre de droite fut descendu et les portes de la niche du poêle arrangées et couvertes, comme il est indiqué sur le dessin. Les deux tiers du temps que dura la séance furent occupés à chanter des airs populaires.
Dix minutes environ après le réglage final de la lumière, le premier phénomène se présenta : une main dans la fente du rideau, à droite de l'extrémité du cabinet ; donc à gauche de la médium. Cette main allait et venait, disparaissait pour revenir se tendre à nouveau. Elle fut prise par moi et par mes deux plus proches voisins ; elle était de grandeur moyenne, nue, chaude et c'était une main droite ; il était donc impossible que ce fut celle de la médium, car on pouvait voir celle-ci assise et immobile sur sa chaise. Après quelque temps je saisis pour la seconde fois une main qui me parut être plus grande que la première ; du moins elle était plus chaude et serrait la mienne avec plus de cordialité.
Plus tard il se montra dans la même fente de rideau une forme entière et lumineuse dont la figure ne pouvait cependant être reconnue. Il me fut permis de couper un morceau du voile de cet esprit. Cette circonstance vous a été exactement décrite par Mlle Hjelt. Ce tissu est un crêpe blanc d'une extrême finesse et de pure soie, ce que j'ai établi par un examen microscopique et chimique. J'en joins ici un petit échantillon.
Déjà avant, mais surtout après cet épisode du voile, des mains se montrèrent souvent à l'autre extrémité du cabinet, serrant celles des personnes les plus rapprochées ; à plusieurs reprises c'étaient deux, même trois mains ensemble. On me l'assura, du moins, car moi je n'en ai rien vu :
1° Parce que j'étais trop occupé à voir ce qui se passait à mon extrémité de cabinet ; j'attendais toujours quelque chose.
2° Parce que le fond était tout à fait sombre.
3° Parce que le corps de la médium y faisait peut-être obstacle ; à cause de cela je vis relativement peu l'épisode du papier et du crayon que Mlle Hjelt a décrit dans tous ses détails. Je vis seulement comment le papier disparut tout à coup des genoux de la médium, et comment, au bout de quelque temps il revint du haut du cabinet (j'avais remis à Mme d'Espérance un feuillet de papier et un crayon). Par contre, j'entendis le froissement du papier, aussi bien dans le cabinet qu'en dehors, et le bruit de l'écriture venant du cabinet. Cette écriture « directe d'esprit » ressemble beaucoup à l'écriture indirecte obtenue dans d'autres circonstances, Mme d'Espérance tenant elle-même le crayon. Je joins ici un échantillon d'une de ces écritures indirectes dont certaines lettres correspondent assez exactement avec l'écriture de la médium. Les paroles de cette écriture directe : « Je t'assisterai ! », se rapportent, selon mon opinion, à la médium ; car le papier ne lui fut pas rendu, pour bien nous démontrer que c'était vraiment une écriture directe.
Dans le courant de l'après-midi, le général Toppelius dit à Mme d'Espérance que, dans la séance précédente, deux messieurs, avant accidentellement touché sa chaise, l'avaient trouvée vide ; ce que, pour ma part, je ne puis admettre, car, occupant la seconde place, à partir du cabinet, j'avais sans cesse Mme d'Espérance sous les yeux. Cette observation parut tout à fait incompréhensible à Mme d'Espérance, et elle en fut tellement attristée que j'en augurai mal pour la dernière séance. Mais il devait en advenir autrement : par la dématérialisation partielle de Mme d'Espérance, il devait être démontré que le siège de la chaise pouvait être vide sans que pour cela la médium s'en fût éloigné. Une dématérialisation aussi complète n'eut pas été aussi nécessaire pour un autre motif que pour celui-là ; car, pendant le phénomène, il ne s'est montré aucun fantôme et il semblait n'y avoir que peu de vie dans le cabinet. Assez longtemps avant ce phénomène de dématérialisation je vis sortir une figure de l'autre extrémité du cabinet, mais elle ne s'en éloigna que d'un pas.
Enfin, il faut encore remarquer qu'à la fin de la séance, le cabinet avait changé de position et reculé de côté, à peu près comme cela est indiqué sur le dessin. Ce changement de position arriva principalement après le phénomène de dématérialisation ; mais, déjà auparavant, j'avais observé des mouvements du cabinet.
Veuillez agréer l'expression de ma haute considération.
Votre tout dévoué

MAX SEILING

E. – Lettre de M. Aksakow à M. Seiling (L’original est en français)

Saint-Pétersboug, le 11/23 janvier 1894

Cher Monsieur,

Il y a dans votre lettre du 15 janvier un détail d'une très grande importance.
Etant à gauche du médium, vous avez pris une main droite. C'est donc un jugement absolu, seulement il faut le préciser. Comment avez-vous pu vous convaincre que c'était une main droite ; par les yeux ou le toucher ou par les deux sens à la fois ? Etait-ce un simple attouchement momentané (comme c'est le cas ordinairement), ou bien un serrement de main en règle, « a shakehand » comme disent les anglais ; c'est-à-dire avez-vous passé votre pouce entre le pouce et le dos de cette main droite, en pressant la paume de cette main avec vos autres doigts, comme cela se pratique ? Pouvez-vous témoigner de tous ces détails avec une parfaite conscience ? Car la preuve du fait serait alors décisive.
Et vos voisins : Mlle Tavaststjerna et M. Schoultz, peuvent-ils témoigner de même que c'était bien une main droite ?
Et puis, vous dites un peu plus loin « Je saisis pour la seconde fois une main » sans ajouter si c'était de nouveau une main droite ?
Voilà le premier point ; le second et dernier détail qui me manque, c'est une description de l’arrangement du cabinet. Comment avait-il été fait ? Dans le no 1 de l’«Ubersinnliche Welt », que je viens de recevoir ce détail manque aussi, et il est nécessaire pour comprendre l'apparition des mains.
Je crois que j'aurai bientôt le plaisir de faire votre connaissance, car je vois qu'une visite à Helsingfors m’est indispensable pour élucider définitivement les phénomènes importants de cette dernière séance et les opinions diverses qui s'y rapportent. Ainsi, j'ai vu dernièrement le général Galindo ; il dit qu'il faisait si sombre qu'il n'a rien pu voir, bien qu'il eut été à côté de Mlle Hjelt. Donc il me serait indispensable de reconstituer toutes les conditions de l'éclairage de la dernière séance pour que je puisse en juger de mes propres yeux. Auriez-vous la bonté de me le faire voir si je venais à Helsingfors ? Et aussi, est-il possible de rétablir, par exemple, si la lumière venant de la rue par la fenêtre, sans store baissé, était occasionnée par un clair de lune et non par la lumière constante des réverbères de la rue ?
En vous remerciant encore une fois de votre obligeance, je me permets comme vous le voyez, de vous importuner de nouveau, et sans cérémonie, remettant le, reste jusqu'a notre entrevue !
Veuillez agréer etc.

A AKSAKOW

F. - Réponse de M. Seiling (L’original est en allemand)

Helsingfors, le 26janvier 1894

Monsieur le Conseiller d'État,

Je suis très heureux de pouvoir vous donner réponse de suite, ayant par suite de l'ouverture du parlement une journée de liberté.
Je vous dois donc encore des explications sur deux points. L'un se rapporte à la manière dont j'ai pris la main. Les deux fois, c'était bien véritablement une main droite, un «shakehand » comme vous le décrivez dans votre lettre ; et comme vous pouvez uniquement échanger entre elles deux mains droites (ou deux gauches) il ne peut y avoir sur ce point le moindre doute. C'était une preuve absolue, autant qu'on pouvait la désirer ! Le caractère des deux « shakehands » était cependant différent. La première fois, la poignée de main était semblable à celle d'une personne indifférente ; la deuxième fois elle était énergiquement cordiale. La deuxième main était aussi plus chaude que la première.
Mlle Tavaststjerna que j'ai été voir aujourd'hui a senti tout à fait pareillement et elle est prête à jurer que c'était une main droite.
M. Schoultz, que j'ai été voir aussi, n'est pas aussi sûr de son affaire parce que les pointes de ses doigts seulement furent pressées par la main de l'esprit ; il n'échangea du reste pas de « shakehand » et n'eut affaire qu'à la première main.
L'autre point se rapporte au cabinet. Celui-ci était établi avec un paravent à 4 feuilles, de sorte qu'il était deux fois plus large que profond ; afin de lui donner du soutien, on avait attaché en haut, par devant, un manche à balai, au moyen de ficelles ; une couverture de laine le fermait par le haut, et deux plaids le fermaient par devant ; il y avait donc ainsi une entrée au milieu et des deux côtés. J'ai appelé à l'occasion « fente de rideau » ce passage de côté ; c'est par là que vinrent les mains, et elles étaient à une certaine hauteur, comme venant d'une personne qui se serait tenue debout. Dans le milieu, les plaids se croisaient un peu l'un sur l'autre, d'environ 0, 15 cent.
J'espère pouvoir rétablir exactement l'éclairage de la chambre où a eu lieu la séance. Il est vrai qu'en ce moment nous n'avons point de neige tandis qu'alors il y en avait beaucoup ; espérons qu'il en tombera d'ici à votre arrivée. La lune ne jouait aucun rôle ; nous avions justement la nouvelle lune. Il faudra évidemment prendre en considération ce point de vue là pour votre visite ici, car l'appartement est situé vers le Sud.
Vous rencontrerez les différentes personnes ayant pris part à la séance, sauf peut-être le général Toppelius qui occupait du reste une très mauvaise place.
Veuillez agréer l'assurance de ma plus haute considération. Votre tout dévoué.

MAX SEILING

[1] Professeur de technologie mécanique, de l'enseignement général des machines et de cinématique, à l'école Polytechnique de Helsingfors.

[2] Il a paru depuis dans les fascicules de janvier et février 1894.

[3] Je lui avais écrit pour le prier de me donner plus de détails sur la séance, le plan de la chambre, les places des assistants, etc.

Chapitre II suite




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